LE JARDIN DE SCULPTURES

L'ancien square Bosquet a été réhabilité et transformé en Jardin de Sculptures afin d'être intégré à l'enceinte de l'Espace des Arts.
Imaginé par le bureau d’étude de la Direction Qualité du Cadre de Vie et Nature en Ville, ce lieu a été conçu comme un espace végétalisé dédié à la sculpture adoptant la forme d'un parvis-jardin clos.
Sa composition repose sur une partie centrale ouverte sur La Fontaine aux enfants de l'artiste Ernest Gabard, restaurée et mise en eau. Cette dernière, conçue dans un style Art déco, entre évidemment en résonance avec le musée érigé dans les années 30.
De part et d'autre de l’œuvre d'Ernest Gabard, deux espaces sous forme d'alcôves jardinées accueillent les sculptures de Charles Despiau, Paul Paulin, Robert Wlérick et Georges Clément de Swiecinski.

La Fontaine aux enfants
Source : Bibliothèque Pireneas/Pau
Conservation : Archives et bibliothèques Pau Béarn Pyrénées

La fontaine aux enfants d'Ernest Gabard

Le notable Charles Latapie lègue 100 000 francs en 1902 pour une fontaine monumentale à la ville de Pau. La réalisation de deux sculptures de taille plus modeste est finalement décidée et confiée à l'artiste palois Ernest Gabard : la Dame au puits et la Fontaine aux enfants.
Cette dernière est conçue en 1920 pour enrichir le Parc Beaumont. Déplacée sur le boulevard des Pyrénées, elle achève aujourd'hui son voyage dans le Jardin de sculptures. Deux années de restauration ont été nécessaires afin de lui rendre sa splendeur passée. La restauratrice Sophie-Jeanne Vidal a effectué un nettoyage méticuleux de l’œuvre. Parallèlement les parties manquantes (pieds, bras, jambes) ont été envoyées à l'usinage et les finitions ont été réalisées par l’Atelier des sculpteurs de Port-Sainte Marie dans le Lot-et-Garonne.
La sculpture d'Ernest Gabard est sculptée dans un marbre blanc veiné de gris de Saint-Béat complexe à sourcer de nos jours. C'est donc tout naturellement que le marbre de Carrare a été utilisé pour les parties restaurées.
L’œuvre d’Ernest Gabard s’inscrit dans un vaste mouvement qui prend son essor après la Première Guerre mondiale et que l’on appelle communément le style Art déco. Au travers de différents supports - peinture, sculpture, ébénisterie, tapisserie, vitraux, céramique, orfèvrerie - les artistes de ce courant revendiquent, en opposition aux formes organiques de l’Art nouveau, un retour à un certain classicisme. Par ses volumes géométriques, ses formes épurées et sa composition équilibrée, la Fontaine aux enfants illustre parfaitement ce renouveau des arts au tournant des années 20, qui trouve durant plus de dix ans une résonance mondiale.
Si le fonds Ernest Gabard du musée des beaux-arts est composé de 19 œuvres, c'est également la Ville de Pau qui est émaillée du travail de l'artiste béarnais. Ainsi, l'église Notre-Dame de Pau constitue ainsi un véritable manifeste de son art : il la couronne d'une Vierge à l'Enfant monumentale inspirée d'Antoine Bourdelle, habille son intérieur d'un Chemin de Croix à la facture à la fois sobre et puissante, puis l'orne d'un bénitier symbolisant la victoire du Bien sur le Mal.

Les sculptures de la collection du musée

> Charles Despiau, torse de l'adolescente, 1929

Charles Despiau débute sa formation à Paris à l’École des Beaux-Arts avec le sculpteur Louis-Ernest Barrias. Au début des années 1900, ses années d'apprentissage derrière lui, son goût le pousse à ne réaliser quasi exclusivement que des portraits. Fruits d'un travail de longue haleine, Rodin vantera "leur puissance plastique et leur vérité psychologique".
Chef de file des sculpteurs indépendants, modeleur sensible et grand bustier, Charles Despiau connaît un grand succès en France mais aussi à l’étranger, notamment aux États-Unis et au Japon.
Charles Despiau exécute ici un buste d’adolescente tout en volume dans une version sans bras et sans tête. Cette étude du corps met en lumière les formes et dépouille le sujet de toute suggestion, particulièrement érotique. Il s'en dégage à la fois force, beauté et simplicité.

> Georges-clément de swiecinski, Buste de paul-jean toulet, 1924

Tailleur et modeleur, mais aussi céramiste, Georges-Clément de Swiecinski est un artiste autodidacte. En effet, sa formation d'interne des Hôpitaux de Paris, attaché aux laboratoires d'anatomie, où il dessine et moule divers fragments, le pousse vers la sculpture.
Il se démarque ainsi, par sa technique, de ses contemporains Charles Despiau et Robert Wlérick et refuse l'expressionnisme prononcé de Rodin, ainsi que les mouvements avant-gardistes de l'époque.
Adepte de la taille directe, il sculpte à même le bloc, en recherche permanente du contact avec la matière.
Excellent portraitiste, il avait le don de saisir la physionomie de son modèle. À propos du buste de Paul-Jean Toulet, Francis Jammes disait : "il a modelé le buste du poète moins en ayant recours à des séances de pose immobile qu'à une observation aiguë et constante du modèle agissant, lisant, écrivant ou parlant, ce qu'il cherchait, c'est le secret de l'âme et le foyer de la vie …"
Sujet de prédilection plus tardif, Georges-Clément de Swiecinski se consacre à la représentation du corps féminin. Il dépeint la femme dans sa plénitude, lascive et épanouie, maternelle… il la sacralise dans ses gestes et ses attitudes les plus simples, la voulant tout à la fois rayonnante et naturelle.

> Paul Paulin, Buste d'Edgar Degas, 1907

Paul Paulin est avant tout un dentiste renommé, passionné d’art, et surtout de sculpture. Au début des années 1880, il aborde celle-ci en autodidacte et a la surprise de voir deux de ses bustes acceptés au Salon. En 1883 il rencontre Degas, qui remarque son travail, et se rapproche ainsi du mouvement impressionniste.
Introduit dans les milieux artistiques les plus avant-gardistes de l’époque, il réalise les bustes de Claude Monet, Auguste Renoir, Camille Pissaro entre autres, mais aussi ceux de nombreux médecins ou politiciens comme Léon Bérard ou encore Louis Barthou. Edgar Degas pose également pour deux modèles, l’un en plâtre et l’autre en bronze (celui du Jardin de Sculptures).
Consécration suprême, en 1917, Rodin refuse des bustes de sculpteurs connus et demande à Paul Paulin de faire le sien pour l’entrée de son musée.

> Robert Wlérick, La Rolande, 1942

Figure très discrète de la modernité classique, Robert Wlérick réalisa beaucoup de bustes et portraits de sa famille. À partir de 1899 il suit les cours de l’École municipale des Beaux-Arts de Toulouse. À la fin de son service militaire, il s’installe à Paris. Il découvre la sculpture antique et étudie les œuvres des sculpteurs italiens du Quattrocento. Il fréquente aussi l'atelier de Rodin et le groupe de sculpteurs “La bande à Schnegg”.
Peu à peu, il renouvelle totalement son approche de la sculpture et se consacre à un art de synthèse et d’interprétation de plus en plus dépouillé, où tous les détails décoratifs sont gommés.
Cette sculpture de La Rolande évoque son attachement à la figure féminine et au portrait nu dans lequel il voit un "côté éternel".
Elle résume à elle seule le travail de Robert Wlérick, entre équilibre et sobriété : une construction plastique intense et une réalisation tout en sensibilité.